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Amsterdam #2 | ensuite, aller d’une berge à l’autre
Amsterdam, deuxième jour
jeudi 23 janvier 2014
Deuxième jour à Amsterdam — cette fois du matin jusqu’au soir : mais justement, je verrai seulement l’aube et la nuit (entre les deux : dans une salle de conférences avec fenêtres dans le dos, et la ville).
couleur d’ombre, pays de peintres vraiment, mais des peintres à portrait, qui ne regardent la ville que pour couler sur la toile des visages à grandes eaux, sur les rides les formes des rues, les trajets invraisemblables pour se rendre d’un lieu à l’autre,
et rien dans le ciel pour la lumière (je pense à celle de Florence), alors on regarde dans l’eau, on voit des visages, c’est là qu’on prend la peinture, à la ville même, celle qu’ils ne peindront jamais,
comme ils n’ont jamais peint cet homme, affolé, qui attendait sur ce pont, qui cherchait quelque chose, mais qui sera resté, tout le temps où je l’ai observé, immobile et désemparé — pour trouver ce que l’on cherche, il faut aller, tourner, fouiller ; lui, non, il demeurait là, peut-être qu’il attendait ainsi depuis des heures, avec son parapluie (il ne pleuvait plus depuis des heures), cherchait, cherchait [1]
et le soir, rien, pas même son nom sur les murs, seulement du temps passé, la couleur de cinq heures dans le ciel ou sur l’eau, comme coulée dans le temps même perdu, emporté,
dans la vitesse d’une ville sans bruit, juste en passant un cri sec qui te prévient que (attention), et tu fais un écart, tu ne comprends pas l’heure qu’il est, à six heures les cafés sont pleins, et à sept heures, toute la ville est vide,
les places aussi, jusqu’où je me suis perdu (mais j’étais tout près de l’hôtel), les trous de lumière auprès desquels je me tiens à cause de la lumière, et non pas à cause des trous,
et toujours, sur tout cela, la lune, comme deux chiens qui lèvent sur elle leurs peurs de chiens, et lapent des pluies comme de la bruine fine et invisible qui recouvre tout, tout sauf la lune,
et quand je me penche, je voudrais tant ramasser mon visage.