arnaud maïsetti | carnets

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le Point du Jour

vendredi 5 avril 2013


au point du jour, c’est le lieu – mais ce à quoi ce jour met un point, on ne le saura pas : au point du jour, passer par-dessus le jour pour mieux voir ce qui de part et d’autre du jour traverse avec moi.

le sexe de la ville, là-bas, tourne sur lui-même, si loin ; sur le pont passent les voitures, à angle droit du fleuve (faut-il qu’il m’en souvienne) : et toute cette nuit autour, qui la voit ?

sur un pont, on est toujours à côté de la ville (comme dans un train, sur le bord d’un monde qu’on longe) : là qu’on peut la voir, seulement, quand on est suspendu entre les deux berges (je ne peux aimer que là), en points de suspensions sur le pont immobile tandis que les voitures me frôlent et que je regarde plus loin où est tombé le jour pour disparaître.

faire le point : mais parfois flou, le point du jour est flou – c’est qu’à bout de bras, dans le froid et le vent, les secousses du corps dans le corps à cause du froid, et sur le corps à cause du vent, tremble, tremble tant que sur l’image c’est l’image qui semble tremblée, et la ville avec elle, tremblée aussi, le réel, ma vie, le visage sous les cheveux, et les cheveux : tout qui tremble, et soi-même de l’autre côté de son bras, tremblant, ne se saisit de rien : c’était pourtant le lieu et l’heure où faire le point, mettre les points sur les i, en retirant au point son i : enjamber.

n’apercevoir goutte, ne franchir mie, n’être rien, ne pas aller : de la pluie, du pain, et de la fatalité des choses vivantes à la nécessité des choses vivantes : ce trajet qu’il faut faire pour faire advenir quelqu’un plutôt que rien. Unités minimales du monde mesurable mesuré dans le jour plein de lui-même. Du point à la ligne, là où je marche est ce fil tendu sous moi qu’est la terre, et je marche.

et surtout surtout, je regarde en bas l’eau passer comme du sable dans le sablier mais qui va rejoindre la mer : je suis dans le haut du fleuve, déjà.

au pas du jour, je m’éloigne du jour pour m’approcher du jour, la nuit n’existe pas, ou comme à l’aveugle un battement de cils, ou comme à nous qui voyons, un battement de cils.

en avant marche (tenir la pas gagné), même image battue le long de mes pas, de vingt-et-une heure une, à vingt-et-une heure quatre ; de l’autre côté, on indiquait le point du jour encore, il suffisait de se diriger vers le centre de la ville : si le centre est ce point et la ville l’endroit où on s’en éloignerait, où aller (appeler ça de l’avant) ; non, le point du jour est là quelque part où je ne suis pas, et j’ai de la terre dans les mains, plein les mains de la terre qui manque.