arnaud maïsetti | carnets

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une vague après l’autre

mardi 16 février 2010

Elle m’avait expliqué une vague après l’autre, le surf est histoire de patience, elle avait ajouté d’oubli, de négligence soigneusement arbitrée, d’élection et de précision, elle avait réfléchi pour lâcher comme pour elle même : de savoir quelle vague et pour quoi, et comment laisser passer derrière soi celle-ci pour s’emparer de la suivante, au bout de combien de temps : et parfois la suivante, c’est des heures après, on ne sait pas.

Alors — j’ai demandé — dans l’eau, on passe plus de temps à ne pas surfer, donc — mais c’est qu’attendre la vague fait précisément partie de ça, qu’il n’y a pas de temps mort, de contretemps si tu veux, le temps comptable n’a pas lieu d’être, n’a pas de rapport avec ce qui se joue dans le fait d’attendre et de se lever, une fois sur cent, et de tomber même à peine levé ; le temps toujours à sa place bat à la fréquence de la vague, une vague après l’autre et ne pas la prendre ne change rien, elle avait répondu.

Des mois plus tard, devant les surfeurs au loin, je me pose et j’attends comme eux — j’ai déjà pris, cet été, d’autres images de ces types qui attendent de se mettre à l’eau, ou ces rangées de surfs dans l’océan, et certains (je les observe) qui sont restés toute l’après-midi et n’ont pris qu’une vague, ou deux.

Cet hiver, sur cette plage, la lumière descend sur eux et tombe juste. Il n’y a pas de vent, pas de vague levée.

Ici, ils se contentent de rester à la lisière, et sur la fin de minuscules vagues, ils lancent leur planche courte en courant, se jettent debout sur elle, glissent sur quelques mètres. N’importe quelle vague suffit pour cela — elle aurait ajouté : pourvu qu’elle soit morte.