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La Ville écrite | défense

vendredi 22 avril 2011


moi, je suis pour la défense

B.-M. Koltès

La ville comme on la lit : rêve d’un récit de la ville à travers ce qu’elle raconte — alors, ce nouvel espace dans mes carnets consacré aux affiches, panneaux, marques inscrites, écrites à la surface de la ville : tous ces hasards de mots qui construisent ce long tissu de sens qui nous enveloppe. Phrases, ou lambeaux de mots, de lettres, qu’on finit par ne plus voir à force de l’habiter. Et puis, il arrive que cela saute aux yeux, soudain. Un mot, délivré du texte : sur un mur, n’importe où, des lettres immenses qui disent : on ne sait pas vraiment. Mais ce qu’elles racontent, dans notre rapport aux mots et aux murs, à égale distance, comme pris dans le champ de force qui nous attire : cela, on ne saurait le dire mieux qu’elles.

J’ouvre cet espace sous belle auspice : en grandes lettres presque effacées sous le tunnel, ce mot de Défense, graphie ancienne — on ne voit pas ce qui suit, on devine. Mais posé sur les parois de ce tunnel, seulement visible des piétons qui essaient dans le noir de rejoindre l’autre fin, ce mot : il y a ce que défend la ville de toute force, et qu’on ignore. Défense : moi aussi, je suis pour la défense, c’est ce que je pense, en passant, ce que je me dis pour me donner de la force — seulement, je dis cela tout bas, car si je parlais haut, les mots me reviendraient si forts qu’ils me dévisageraient.