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Marseille | Et les feux éclipsés du grand astre du monde

mercredi 19 février 2014


Marseille, vent de face où qu’on se trouve. Je viens pour entendre les vers de Virgile, les premiers chants de l’Énéide. Immense puissance et douceur (et mélancolie…) de ces vers. Au détour d’un songe dans le songe, le poète songe au soleil d’hiver, pressé de plonger dans la mer, et à ces nuits où il tarde et retarde le temps. Ici, c’est au moment de plonger comme un temps suspendu, il pourrait hésiter, s’échappe : météore, plutôt que météorite. Impossible en tous cas de passer à Marseille sans voir la mer, un pas me sépare de l’Afrique. Impossible même dans le vent de ne pas suivre la trace du soleil jusque là, qui va plonger.


Iopas prend alors sa harpe enchanteresse.
Chantre inspiré du ciel, il commence, et sa voix
Répète ce qu’Atlas enseignait autrefois [1],

De la reine des nuits la course vagabonde,
Et les feux éclipsés du grand astre du monde,

Le pouvoir qui, créant l’homme et les animaux,
Leur versa de la vie et les biens et les maux,

Les orages, les feux, le char glacé de l’ourse,
Et les astres gémeaux qui conduisent sa course,

L’Hyade et ses torrents ; dit pourquoi des hivers
Les jours si promptement se plongent dans les mers ;

D’où vient des nuits d’été la lenteur paresseuse,
Enfin sur mille tons sa voix mélodieuse

Chantait l’ordre des cieux et des astres divers,

Et sa noble harmonie imitait leurs concerts.

On l’admire : il se tait, et recueille avec joie
Les suffrages rivaux de Carthage et de Troie.


[1Traduction ancienne ici de Jacques Delille qui date de 1804 — la traduction ce soir de Dominique Buisset était une merveille