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À un ami | « Tous les textes de Blanqui sont des textes circonstanciés. »

lundi 10 novembre 2014

Par le Parti Imaginaire.


Tous les textes de Blanqui sont des textes circonstanciés. Ils sont chargés des conditions dans lesquelles et contre lesquelles ils sont écrits. Il n’y a pas jusqu’à L’Éternité par les astres qui ne porte la mention du Fort du Taureau. D’où l’inexistence de l’œuvre de Blanqui, au sens de ce qui recueille en soi le tout d’un trésor. D’où l’absence aussi d’une doctrine blanquiste, comme il y a une métaphysique marxiste. « Un peu de passion, et les doctrines plus tard ! » Ce qu’il y a, en revanche, c’est un style blanquiste. « Les révolutions veulent des hommes qui aient foi en elles. Douter de leur triomphe, c’est déjà les trahir. C’est par la logique et l’audace qu’on les réalise et qu’on les sauve. Si vous en manquez, vos ennemis en auront pour vous ; ils ne verront qu’une chose dans vos faiblesses : la mesure de leurs forces. Et leur courage se relèvera en raison directe de votre timidité. » Tout est là.

Blanqui est l’inventeur du « Ni Dieu ni maître », c’est l’homme qui a écrit « l’anarchie régulière est l’avenir de l’humanité » et l’auteur d’un plaidoyer contre le mutuellisme et en faveur de l’association intégrale intitulé « Le communisme, avenir de la société ». Allez chercher une orthodoxie là-dedans. Bien entendu, construire une force révolutionnaire quand il s’agit de renverser une monarchie administrative, quand il n’y a qu’une élite à abattre, peut être le fait d’une élite. Quand les armées de Bismarck marchent sur Paris, agir révolutionnairement veut peut-être dire : « confection de barricades et de tranchées ; affectation des églises aux usages nationaux, armement des prêtres et, par voie de conséquence, suppression des cultes ; enrôlement forcé ; mise en commun des subsistances et rationnement ; licenciement et dispersion des anciennes forces de police ; dénonciation des suspects et des bonapartistes » (Dommanget, Blanqui).

Dans la société présente, où le pouvoir circule à même les flux de nourriture, d’information et de médicaments, où n’importe quel citoyen fait valoir ses droits au flicage de ses voisins, il va de soi qu’une force révolutionnaire doit embrasser tous les aspects de l’existence, qu’elle doit se construire comme force de ravitaillement et comme force armée, comme puissance poétique autant que médicale, qu’elle doit s’emparer de territoires. Elle doit concentrer tous les renseignements utiles sur l’organisation adverse et provoquer des désertions dans tous les rangs de la société. Elle doit se socialiser à mesure même que le social se militarise. Mais pas plus qu’hier, elle ne peut attendre. Une telle force est en cours de constitution. Si elle se penche sur Blanqui, ce n’est que pour mieux penser la guerre en cours.