arnaud maïsetti | carnets

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l’automne, disent-ils

lundi 29 août 2016

[/L’automne, déjà ! – Mais pourquoi regretter un éternel soleil, si nous sommes engagés à la découverte de la clarté divine, – loin des gens qui meurent sur les saisons.

Rimb./]


Ils appelaient ces jours la rentrée. Ils oubliaient que le mot porte en lui la mélancolie des soleils couchants tard dans le soir de l’été, et le chagrin des enfants qui recommenceront à partir de septembre à compter le temps jusqu’au dimanche, éperdus qu’ils étaient à vivre dans l’éternité du soleil brûlant – ils nommaient cela la rentrée pour ces raisons aussi : cruelles et inutiles.

On en éprouvait beaucoup de colère, et beaucoup de fatigue.

Après la fatigue, il nous fallait regarder le ciel : voir comme il était vide encore, et y puiser le courage d’être de la fatigue et de la colère en vie.

Ces mots de rentrée portent la vulgarité du monde qui recommencerait toujours à la même place. Les livres sur les étagères étaient toujours les plus inutiles. Sur les bandeaux rouges qui cernaient les couvertures, ils annonçaient vulgairement les best-sellers avant même qu’ils soient vendus : allégorie. Toute cette réalité semblait déjà écrite. Et pourtant, on la refusait terriblement.

Contre les rentrées de toute sorte, il y a les arbres et les feuilles, dans les villes, ces étés brûlés d’un début de siècle qui en est déjà à son quart. La couleur de feu des feuillages tremblent : la rentrée est littéraire et politique, disent-ils, mais cette littérature et cette politique sont le contraire de la littérature et de la politique. Elle est scolaire aussi : et en voyant les enfants courir vers les cours d’école, il faut les imaginer aller, s’armer du désir d’un jour fouler aux pieds les livres tièdes et les politiques de papier comme des feuilles d’automne.

En attendant, ce n’est pas encore l’automne ni la rentrée : mais ce n’est plus l’été. On ne sait pas ce que c’est. On y resterait un peu, comme dans les marais salants, respirer le fleuve et la mer. Avec la colère, la fatigue et l’amertume du sel pour compagnons.

Et les horizons en partage des arbres bientôt dévastés, eux qui n’en savent rien.