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William Blake | « La petite fille retrouvée »

mardi 12 janvier 2021

Traduction personnelle des Chants d’innocence et d’expérience
— ici le sommaire des poèmes
— là les carnets de la traduction


La nuit durant dans le malheur
Les parents de Lyca vont
Au plus profond des vallées,
Entre les larmes des déserts.

Epuisés, affligés,
La voix brisée de plaintes,
Main dans la main, sept jours
Ils ont frayé les chemins du désert.

Sept nuits ils dorment
Parmi les ombres profondes,
Et dans leurs rêves voient leur enfant
Affamée dans le désert sauvage.

Pâle à travers les chemins effacés,
L’image rêvée s’égare,
Amaigrie, enlarmée, affaiblie,
Creusée sous ses cris pitoyables.

Intranquille, elle se lève,
La femme toute de tremblement dressée
Sur ses pieds épuisés de malheur,
Elle ne pouvait aller plus loin.

Dans ses bras, il portait
Son corps, embrassée d’inouïes douleurs,
Jusqu’à ce point où sur le chemin
Un lion se trouvait allongé.

Rebrousser chemin était peine perdue.
Bientôt, sa lourde crinière
Les invita à s’incliner au sol,
Puis il tourna autour d’eux,

Renifla leur proie,
Mais leur peurs s’apaisent
Quand il lèche leurs mains,
et qu’il se tient à côté d’eux, en silence.

Ils plongèrent leurs yeux dans les siens,
Emplis de surprise,
Et se demandant ce qu’était
Cet esprit armé d’or.

Sur sa tête une couronne,
Sur ses épaules tombait
En cascade une chevelure dorée.
Emportée, leur douleur.

« Suivez-moi » dit-il,
« Ne pleurez-plus l’enfant ;
Dans les profondeurs de mon palais,
Lyca repose endormie. »

Ils suivirent alors
Le chemin que leur donna la vision,
Et virent leur enfant endormie
Parmi les tigres sauvages.

Depuis ce jours, ils vivent
Dans ce vallon solitaire,
Sans craindre le hurlement du loup,
ni le rugissement du lion.

.

 [I]


[IThe Little Girl Found

All the night in woe
Lyca’s parents go
Over valleys deep,
While the deserts weep.

Tired and woe-begone,
Hoarse with making moan,
Arm in arm, seven days
They traced the desert ways.

Seven nights they sleep
Among shadows deep,
And dream they see their child
Starved in desert wild.

Pale through pathless ways
The fancied image strays,
Famished, weeping, weak,
With hollow piteous shriek.

Rising from unrest,
The trembling woman pressed
With feet of weary woe ;
She could no further go.

In his arms he bore
Her, armed with sorrow sore ;
Till before their way
A couching lion lay.

Turning back was vain :
Soon his heavy mane
Bore them to the ground,
Then he stalked around,

Smelling to his prey ;
But their fears allay
When he licks their hands,
And silent by them stands.

They look upon his eyes,
Filled with deep surprise ;
And wondering behold
A spirit armed in gold.

On his head a crown,
On his shoulders down
Flowed his golden hair.
Gone was all their care.

‘Follow me,’ he said ;
‘Weep not for the maid ;
In my palace deep,
Lyca lies asleep.’

Then they followed
Where the vision led,
And saw their sleeping child
Among tigers wild.

To this day they dwell
In a lonely dell,
Nor fear the wolvish howl
Nor the lion’s growl.