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[ phrases ] #4 — rêves de souillure

jeudi 20 octobre 2011


Blancheur du monde dans laquelle personne ne pourrait se cacher, monde plus blanc encore que l’idée même de blanc, le sol, le plafond, les murs, mais des murs qui n’entourent rien, pas des murs donc, simplement une surface mate de choses et de vie qui ne représente rien, c’est cela, oui, toute une matière immobile où rien ne pourrait être représenté sans souiller tout, et tu entres ici, et ton ombre se répand et couvre peu à peu l’espace de tes pas, de ta respiration, puis de ton ombre qui s’efface sous elle-même et c’est un immense puits de noirceur qui émane de toi et aveugle plus que le blanc, alors la dernière chose que tu entends avant de ne plus rien voir du tout, c’est un cri qui sort de ta bouche et projette le monde dans l’invisibilité définitive.

Là, ce sont des allées comme on en trouve dans nos cimetières ou nos jardins, mais je ne fais plus la différence depuis, enfin cela compte peu en regard du bruit que font mes pas dans l’herbe haute jusqu’au mollet, alors je presse le pas parce que le bruit me chasse, persuadé d’être suivi, je passe entre les dalles gravées, je tourne et plus le bruit me suit, plus j’accélère et plus le bruit de mes pas dans les herbes se fait plus fort ; je ne vois pas le rapport entre la vitesse et le bruit, et le bruit me cerne, fait le tour de moi, me devance bientôt et l’herbe monte jusqu’au sexe, le ventre, le torse, la gorge.

La sensation de chute dans le corps de l’autre qui demeure sans visage, un simple corps béant où je me perds comme on descend les escaliers d’une cave, jusqu’à ce que sa voix m’interroge et me demande où je vais.